ABSTRACT

Les récits de voyage sont l’une des principales sources pour la connaissance des autres. Leurs auteurs ne sont pourtant pas des savants professionnels, et ils ne s’embarrassent pas de questions de méthode: ils rapportent ce qu’ils ont vu et entendu. Même un auteur comme Lafiteau, qui présente une description systématique et non un récit de voyage (Mœurs des sauvages américains, 1724), ne se pose pas la question de savoir si cette connaissance des autres lointains et si différents de nous ne pose pas de problèmes particuliers à l’observateur et à l’écrivain. Montesquieu voit bien le problème dans les Lettres persanes, mais il s’agit d’un voyage imaginaire, et du regard que les autres jettent sur nous: les voyageurs européens ne sauront en tirer aucun profit. Du reste, De l’esprit des lois accueille les récits de ces voyageurs sans soulever aucune objection, et intègre leurs informations à celles dont on dispose sur notre société, sans que cette intégration pose un quelconque problème.