ABSTRACT

Il y a un peu plus d’une décennie, le président de 1’Association canadienne des géographes (ACG) notait l’observation de Northrop Frye selon laquelle les paradoxes de la culture et de l’identité canadienne ont souvent été formulés en littérature canadienne non pas en termes de ‘Qui suis-je’ mais plutôt de ‘Où suis-je’? (Villeneuve 1993: 98). Jusqu’à tout récemment, cette préoccupation—pour la critique littéraire et les études canadiennes plus généralement—envers le rapport des Canadiennes et des Canadiens aux lieux, les spécificités régionales et leurs effets sur l’identité est demeurée marquée par le double héritage du colonialisme et d’un certain déterminisme environnemental (Warley, Ball et Viau 1998). Ce déterminisme se justifiait toutefois un peu par l’énorme défi logistique posé par le développement spatial, économique et social de l’écoumène pionnier, la création du Canada en tant que nation ‘dans la pensée des gens’ (Warkentin et Simpson-Housley 2001: 282) et la vastitude des espaces ainsi que la rigueur du climat et de l’environnement dans la plupart des régions du pays. Il n’est pas surprenant que la géographie en tant que discipline ait longtemps été caractérisée au Canada par une forte orientation ‘appliquée’ comme en témoignent sa relation étroite avec le service public, son attention particulière aux géographies du Canada et son souci d’explorer la place occupée par le ‘lieu’ et le ‘territoire’ dans les identités canadienne et québécoise.