ABSTRACT

1 La poste va partir, et comme j’ay eu beaucoup à ecrire ce matin, ma main est lasse. Je ne veux pourtant pas me servir de ces excuses. J’aime bien mieux vous ecrire ma chere Henriette. les eaux en effet ont determiné la goute à mon pied, et pourvu qu’elle ne devient pas plus violente c’est un mal beaucoup moindre que la fievre qui m’a persecuté pendant trios ans. Je suis parvenu à cet age ou l’on se trouve trop heureux de composer avec les maladies, parcequ’on ne sauroit esperer de les eloigner toutes. Je ne scais je vous jure ma chere Enfant quand Je feray le voyage d’angleterre, Je n’y puis pas aller qu’on ne me fraye le chemin, et pourtant il est d’une grande importance pour moy d’y etre. J’espere que cet hiver decidera de mon sort, car en verite une plus longue suspension devient insupportable, et je n’ay pas merite qu’on prenne à tache de la faire durer. 2 il est tres vray que mon parti est pris sur l’exil et sur tous les autres evenemens de la vie. mais il est vray aussy que Je n’ay negligé rien de tout ce qu’un homme d’honneur doit faire pour procurer la fin de cet exil, depuis qu’on m’à ouver et ouvert la porte avant meme que j’y eusse frappé. Je continueray à agir de meme, et je feray en sorte que le mauvais succes meme n’aura rien de honteux pour moy. il faut esperer que le bon succes second-era nos desirs. faites mes complimens à nos frères, et receves ceux de la Marquise. Adieu ma chere fille Je vous embrasse et je vous aime de tout mon coeur.