ABSTRACT

Plusieurs siècles ont été nécessaires à la dynastie éthiopide pour établir son autorité sur le Rwanda. Il semble que les populations qui ont été progressivement incorporées dans l'état rwanda vivaient sous trois types d'organisation politique. Au Rwanda oriental, des familles tuutsi-hima et hinda avaient créé de petits états inféodés comme le Mubari, le Gisaka, le Bugesera et plus au nord le Nordwa-Mpororo. La famille régnante du Rwanda a dû s'affranchir du Bugesera qu'elle a conquis plus tard avec les autres petits royaumes. Dans l'autre partie du Rwanda actuel, les Tuutsi conquérants eurent à faire soit à des lignages autonomes sous l'autorité d'un chef (comme au Kibari, au Bugarura, Buberuka et surtout au Mulera) dont les fonctions ont été décrites dans le chapitre précédent, soit à des patriarches-devins qui gouvernaient un petit territoire. Ces derniers portaient le titre de hiinza (cl. 1, 2) qu'on pourrait traduire par « patriarche éminent » (comme au Budaha, Buhoma, Bukonya, Bushiru, Bwishaza, Kingogo, Marangara, Nduga) ou le titre de roi (-admi, cl. 1, 2) (comme au Busozo et au Bukunzi). Au fur et à mesure que la conquête tuutsi avançait, le mot hiinza commença à signifier « usurpateur » ou « rebelle ». Le hiinza était une autorité à l'image des occupations économiques de son peuple: il était le suprême agriculteur. On lui attribuait des pouvoirs magiques en tant que faiseur de pluie et préservateur des récoltes. On peut admettre qu’il ait été un puissant chef de lignage que les autres groupes de parenté de sa région reconnaissaient comme éminent. Sa charge, comme celle du roi du Busozo, était héréditaire. Les relations du roi du Busozo avec ses sujets étaient réglées par un cérémonial complexe. Il ne pouvait leur parler que caché. Sa puissance étant considérée comme d'origine divine et avait un emblème sacré, le tambour royal. Le roi devait observer de multiples interdictions dont la transgression aurait pu nuire à sa pureté rituelle. Ces observances lui étaient imposées jusqu'au moment où il était sûr d'avoir un héritier qui, à son tour, y était assujetti. Pendant la minorité de ce dernier, la reine-mère gouvernait.